Communiqué de presse

Accord commercial entre l’UE et le Mercosur : un accord « perdant-perdant »

Négocié depuis de nombreuses années, un accord commercial a été signé, le 28 juin 2019, entre l’UE et le Mercosur (Argentine, Brésil, Paraguay, Uruguay).

A écouter la Commission européenne, il semblerait que cet accord soit uniquement « gagnant-gagnant ». Pourtant, à y regarder de plus près, les sources d’inquiétudes sont malheureusement nombreuses et font craindre le scénario inverse.

Les droits des travailleurs sont ainsi soumis à rude épreuve : plusieurs pays du Mercosur n’ont toujours pas ratifié certaines des Conventions fondamentales de l’OIT qui concernent les droits syndicaux les plus élémentaires et les plus fondamentaux. Et, triste habitude dans ce type d’accords commerciaux, le chapitre dévolu au développement durable et aux conditions de travail n’est pas contraignant. En cas de non-respect des dispositions contenues dans ce chapitre, aucune sanction n’est prévue.

Pourtant, la Commission européenne se targue de pouvoir, le cas échéant, utiliser les accords commerciaux conclus comme leviers pour que les pays partenaires revoient leurs politiques climatiques, respectent les droits des travailleurs et des travailleuses… Clairement, le modèle proposé dans l’accord UE-Mercosur n’en prend pas le chemin. Au contraire, la Commission européenne accepte de conclure des accords commerciaux avec un leader politique (Jair Bolsonaro) aux idées d’extrême-droite clairement assumées et qui n’hésite pas à bafouer les droits humains les plus élémentaires et à remettre en cause la participation de son pays aux accords de Paris. Est-ce cela le message politique que l’Union européenne souhaite envoyer ?

Par ailleurs, le MOC et ses organisations constitutives réitèrent leur opposition à la logique intrinsèque de ces accords commerciaux qui visent à marchandiser un maximum de secteurs économiques et sociaux au détriment des droits humains.

Au vu de l’urgence climatique, le MOC et ses organisations constitutives s’interrogent également : n’est-il pas enfin temps que la Commission européenne développe des politiques cohérentes ? Le MOC s’étonne en effet du grand écart pratiqué en matière de politique climatique. D’un côté, la Commission européenne annonce en grande pompe le lancement d’un « Green New Deal » dont l’ambition est, d’après ses propres termes, de faire de l’Europe « le premier continent climatiquement neutre au monde d’ici à 2050 ». De l’autre, une récente étude démontre que les émissions en CO2 de l’Union européenne devraient augmenter dans le cadre de cet accord commercial avec le Mercosur.

En matière agricole enfin, c’est aussi l’incompréhension la plus totale. Sans même évoquer la question des risques sanitaires posées par les législations plus « permissives » des pays du Mercosur, le verdict est en effet sans appel : avec ce type d’accords, l’agriculture familiale court (encore davantage) à sa perte. Dans ce contexte, le MOC et ses organisations constitutives apportent tout leur soutien au monde agricole belge et européen qui, de plus en plus, s’oppose à ces accords commerciaux.

Pour le MOC, les accords de libre-échange ne seront jamais des instruments de développement efficaces, car les populations sont oubliées, reléguées au rôle de consommateur·rice et non d’acteur·rice de leur développement. De plus, le modèle qu’ils soutiennent exacerbe les accaparements de terres, contamine les écosystèmes et tend à augmenter la répression de la contestation sociale de citoyen·ne·s qui expriment des préoccupations légitimes. Ces violences font chaque année des centaines de victimes sur le continent. L’Union européenne doit donc absolument opérer un virage à 180 degrés pour viser un développement social durable et juste socialement dans le cadre de ses relations commerciales, mais également dans ses politiques de coopération au développement.

Et puis, l’épisode du CETA nous l’a démontré : pour qu’ils puissent être débattus publiquement, il est crucial que ces accords restent des accords « mixtes » afin que nos différents parlements nationaux et régionaux puissent s’en saisir, en débattre et les voter en toute connaissance de cause.

Voici donc une série (non exhaustive) d’éléments qui amènent le MOC et ses organisations constitutives à demander aux Parlements wallon et bruxellois et aux gouvernements wallon et bruxellois de s’opposer à l’accord UE-Mercosur et à ceux du même acabit et de continuer à plaider fortement auprès du gouvernement fédéral pour que la Belgique et les institutions européennes soutiennent fermement la conclusion du projet de traité de l’ONU sur les multinationales et les droits humains, visant à rendre les premières responsables juridiquement de leurs actes afin que les droits humains ne soient plus jamais relégués au second plan.

Ariane ESTENNE
Présidente du MOC

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