Communiqué de la plateforme pour l’interculturalité à Tournai

La mélodie des AK-47 est-elle plus douce au soleil ?

La plateforme pour l’Interculturalité à Tournai se réjouit de l’accueil réservé par notre pays, notre région, notre commune à ces femmes, ces hommes et ces enfants qui fuient le conflit armé russo-ukrainien. Cette mobilisation démontre une capacité éclatante d’empathie et de solidarité : valeurs que notre ASBL et ses membres défendent depuis de nombreuses années.

Cependant, s’il n’est nullement question de relativiser ou minimiser le drame qui se passe en Ukraine, le traitement médiatique et les décisions politiques inhérentes à l’exil de ces hommes et ces femmes nous plongent dans un grand sentiment d’inconfort. Nous sommes visiblement nombreuses et nombreux à nous sentir proches des Ukrainiennes et des Ukrainiens. De même, il semble également évident pour beaucoup – et nous en faisons partie - qu’il faille prendre des mesures permettant de les accueillir. Toutefois, alors que cela fait des années que des femmes, des hommes et des enfants fuyant des guerres voient la route de l’exil les mener jusqu’à nous, nous nous interrogeons : pourquoi donc cette nécessité d’accueillir des personnes fuyant la guerre s’impose aujourd’hui avec tant de force et trouve un écho si large et retentissant ?

La proximité géographique ? Probablement. La peur engendrée par une « menace russe » partagée ? Peut-être aussi. Mais cette proximité et cette peur ne sont-elles pas également renforcées par le sentiment que ces gens-là nous ressemblent ou seraient proches de nous en termes de culture, de classe et d’origine ethnique ? La question se pose. Sommes-nous en proie, consciemment ou inconsciemment, à une volonté d’homogénéité sociale, culturelle et ethnique ? Après tout, un vieil adage ne dit-il pas « Qui se ressemble s’assemble ? ». D’aucuns diront même que ça peut sembler « naturel », que ce phénomène de préférence pour celles et ceux qui nous ressemblent apparaît comme une évidence…

Nous estimons que nous sommes en droit d’attendre (d’exiger ?) de la part des journalistes et de nos responsables politiques qu’ils et elles ne se laissent pas guider par des ressemblances et/ou de prétendues évidences. Qu’ils et elles fassent preuve de davantage de discernement, d’analyse et d’éthique… Tout être humain qui, fuyant des conflits armés, se retrouve sur les chemins de l’exil ne mérite-t-il pas le même traitement, la même considération ? Nous pensons que si. Incontestablement.
Et si d’éventuels principes de similitude ou de ressemblance devaient déterminer les décisions politiques et le travail journalistique, nous vous invitons à vous poser les questions suivantes : Les armes qui grondent en Ukraine ne sont-elles pas les mêmes qu’en Afghanistan ou en Syrie ? La mélodie des AK-47 est-elle plus douce au soleil ? Les balles qui ôtent des vies à Kiev ne sont-elles pas les mêmes qu’à Chenna ou Asmara ?

Gageons que l’enthousiasme qui caractérise la mobilisation pour accueillir les Ukrainiennes et les Ukrainiens ne faiblisse pas avec le temps et que chacun.e d’entre eux.elles puisse trouver dans notre pays, notre région, notre commune une bienveillance sans faille ainsi qu’une réelle prise en compte de ses besoins et le respect de ses particularités en accord avec nos valeurs démocratiques.

Gageons également que cet élan de solidarité auquel nous assistons puisse marquer les prémices d’une politique d’accueil qui permette à chaque homme, chaque femme et chaque enfant en exil de connaître des routes plus sûres et d’être considéré et traité avec la même humanité. Que toutes et tous puissent trouver chez nous un accueil digne, solidaire et inconditionnel.

Photo d’illustration : Bleu de Chine de Bruno Catalano Voir moins

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